En rentrant de la Tour de Vesvre hier soir, le clignotant rouge m’indiquait qu’un message téléphonique m’attendait ; le numéro affiché, un portable (dépourvus d’attribution géographique, ces numéros sont difficiles à retenir…), ne me disait rien. A son écoute, le timbre de la voix ne me disait rien non plus, au point où j’ai tout d’abord pensé qu’il s’agissait d’une erreur ; tout au plus avais-je compris le prénom de mon interlocuteur. Puis, la dernière phrase est tombée : « mon père est décédé cet après-midi à l’hôpital de Bourges »...
Pour les habitués du blog, Denis Fargeot (ici lors d’une sortie à Blancafort en 2011 avec les ATV) était surtout l’auteur de toutes les vues virtuelles du site de Vesvre, qu’il composait avec le plus grand soin et beaucoup de rigueur, aidé de Jean-Marie Tournefier, cousin de son épouse et virtuose en informatique.
C’est lui qui m’avait, il y a une dizaine d’années, parrainé lors de mon entrée à l’Association des Amis de la Tour de Vesvre. Ce jour fut le début d’une aventure passionnée que je n’aurais jamais vécue sans Denis. C’est aussi lui qui, à force de patience et de pédagogie (avec moi, il en faut…) m’a initié au maniement de quelques logiciels de dessin et de traitement d’image sans lesquels je n’aurais jamais pu ouvrir mon blog.
Denis, ce n’était pas que la Tour et l’assistance informatique en ligne, mais aussi un de mes plus proches amis, parti trop tôt comme tant d’autres ces 5 dernières années. Passionné de musique celtique, il travaillait ces derniers jours avec un grand auteur-compositeur-interprète breton, même si ses tentatives pour me communiquer ce virus-là ont toujours été des échecs… Doté d’une mémoire surprenante, il pouvait passer une heure à me raconter une séance d’enregistrement des Rolling Stones, connaissait les particularités du jeu de tous les musiciens des grands groupes de Rock’n Roll et de Blues, comme s’il avait passé sa vie avec eux ! Même si je ne comprenais guère la subtilité de son discours, l’écouter était pour moi un émerveillement !
Ayant eu dans sa jeunesse (il nous a quitté à 62 ans) une Simca 1000 « Rallye 2 » dont je peux lui faire confiance pour avoir fait chauffer la gomme des pneus, il se passionnait aussi pour les belles voitures, la mécanique auto (là, notre conversation était plus équilibrée), l’aviation et, doté d’une curiosité naturelle sans limite, s’intéressait à tout !
Cependant, c’est sa passion pour l’histoire et l’architecture médiévales qui lui avaient permis, jusqu’à il y a peu, de remplir ses journées. Des heures durant, attaché au souci de la vérité et du détail, il reconstituait sur son ordinateur (survitaminé par Jean-Marie…) les différents éléments architecturaux s’étant succédés au cours des siècles à Vesvre. Là aussi, sa mémoire hors du commun lui faisait raconter le déroulement de batailles médiévales mieux encore que s’il y avait participé !
Comme moi, Denis détestait la passivité, la servilité, la lâcheté, l'ingratitude, l'indifférence, bref la médiocrité qui est l'apanage de tant de gens. Rigoureux et se sentant toujours redevable à l'excès, il était animé par le souci de la perfection et la qualité des sentiments.
Denis, c'était aussi un pseudo, "Malobosco" (latinisation du nom du lieu-dit, Maubois, où il réside), qu'on ne verra hélas plus sur mon blog. Un commentateur d'exception qui nous quitte.
Il était aussi très apprécié dans son village de Menetou-Râtel, qu’il n’a jamais quitté, mais j'en laisse les habitants parler bien mieux que moi de cette facette du personnage.
Ma pensée va bien sûr tout d’abord à son épouse et ses deux enfants, une famille très unie qui n’a cessé de l’entourer de son amour, et on ne peut aussi que remercier tou(te)s ceux et celles qui ont œuvré à ce que sa vie soit la plus supportable et digne possible. A commencer par Mme Piat (CMP de Sancerre), toujours disponible lorsqu’il avait un « coup de blues » ; Christelle et Mehdi Barbouche, dont les soins de kinésithérapie faisaient le plus grand bien à son corps fatigué ; Victorine Mataouchek (archéologue à l’INRAP d’Orléans), qui avait compris que la passion et la compétence ne se mesuraient pas uniquement au nombre de diplômes alignés sur un CV…
Un regret : son souhait que l’accessibilité du site de Vesvre aux « personnes à mobilité réduite » n’a jamais été jugé digne qu’on s’y intéresse. Probablement ne faut-il y voir qu’une coïncidence mais, alors que Denis vivait ses derniers moments, j’étais à Vesvre en compagnie d’un couple de Hollandais ; la dame, en fauteuil, a dû se contenter d’admirer la façade alors que j’emmenais le monsieur en visite…
Alors, merci, Denis, pour tous ces bons moments que nous avons passés ensemble. Comme dans la chanson « les Copains d’Abord » de Brassens, « jamais ton trou dans l’eau ne se refermera » !