Après 36 ans à Veaugues, direction Le Noyer pour vous faire découvrir son cadre, son histoire, et aussi quelques billets d'humeur...
Par sirius
Alors que nous étions en pleine « guerre » entre tenants de la laïcité (fut-ce au prix du ridicule) et « calottins », le Maire républicain de Cosne organisa les 15 et 16 Juin 1907 une fête grandiose au cours de laquelle le Secrétaire d’Etat à la Guerre devait inaugurer, entre autres, la statue d’une République en majesté. Celle-ci avait pourtant déjà bénéficié de deux inaugurations (tout était bon pour organiser un vin d’honneur), mais il est vrai qu’un forgeron de bronze venait d’être ajouté à « l’un des quatre coins du socle… circulaire ».
La statue sur son "socle rond à 4 coins carrés", avant l'installation du forgeron.
C’était sans compter sur l’imagination vindicative de l’opposition. Au cours du banquet officiel, qui se tenait dans la Chaussade (anciennes forges), un cuisinier complice ajoute à la sauce du « poulet tortue », destiné à la table officielle, une savante préparation laxative dont l’action devait être foudroyante et prolongée.
La cérémonie en question consacra l'installation de ce forgeron de bronze
Bien sûr, il avait été prévu de nombreux urinoirs pour les hommes dont il était convenu de dire qu’ils « commandaient le vin à la fillette pour pisser au décalitre » En revanche, un seul cabinet avait été aménagé. Preuve supplémentaire de la méchanceté de l’adversaire, le petit endroit était pourvu, pour un usage qu’il n’est pas besoin d’expliquer, de feuilles de papier découpées dans un journal local.
Une débâcle intestinale générale se déclara, provocant d’incessants va-et-vient de personnalités tout au long des cérémonies qui suivirent. Résolu à faire front à l’adversité, le Général de service (2 étoiles et le même nom qu’un alcool français réputé), refusant trop longtemps de se soumettre aux exigeances de la nature, dut, vaincu, se résoudre à aller changer de pantalon.
La présence de la statue, ainsi que les modèles de voitures (toutes françaises...) datent cette vue de l'immédiat avant-guerre.
Curieusement, seul le Ministre ne semblait pas affecté. Il défila, coupa les rubans, écouta les enfants chanter le « Salut la République », dévoila le Monument aux Morts républicain, prit tout son temps pour remettre 42 décorations. Si l’une d’elle était celle de la Croix d’Officier de l’Instruction Publique, le hasard voulut que la seconde soit celles des épidémies… Alors, une révolution intestinale aussi soudaine qu’irrépressible l’obligea à s’interrompre pour se précipiter vers les commodités proches au Café du Commerce. Humiliée et furieuse, l’Excellence bouda le dîner et, sans attendre l’envol du ballon prévu pour le lendemain, repartit comme elle était venue.
Après l’éclatant succès de leur conspiration, les adversaires du « parti du progrès » remplirent, sous les signatures fantaisistes de G. Lafoir, Vol de Boisvert, etc…, les colonnes du Journal de Cosne de poèmes jubilatoires (Ballade à la Lune, le Banquet, etc…).
La statue et le forgeron furent démontés par l'Occupant qui en réutilisa le métal à d'autres fins. La camionnette à gauche est une Peugeot de l'immédiat après-guerre et, tout au fond, on distingue les convois d'un cirque ou d'une fête foraine.
Ce récit est tiré de l’ouvrage « la Vallée du Nohain » de Jeanne Pautrat, et je remercie M et Mme Balland, des Editions AàZ Patrimoine (qui mettent à votre disposition toute une collection d’ouvrages concernant l’histoire et la littérature locale) de m’avoir autorisé à le publier ici.
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